Friday, August 16, 2013

Readymade Motel - La lune n'était pas encore dans le ciel.

Readymade Motel: une chambre improvisée - ancien magasin - depuis un entrepôt - une nuit un motel - toujours un bordel organisé - restants de fantômes dans les mots des 'autres'...

"On ne peut faire d'oeuvre d'art si on ne part pas d'une autre oeuvre d'art."
- Paul-Marie Lapointe (1929-2011)


  La lune n'était pas encore dans le ciel.

                Une nouvelle expérience a touché les fondements de mon âme - instantanément transformée en une espèce de truc brumeux plein de filaments - depuis les derniers mots que j'ai écris. Les flammes se sont élevées de plus en plus haut, brûlant l'étrangeté de cette scène intime. Une sensation de chaleur et de bien-être. Quand je me réveille, je la chasse...

    Dans l'immédiat, ce besoin d'être seul, au sein de certaines angoisses, pour conserver ou pour détruire, pour désoler et ravager ce monde parcouru par des frissons de rage ou étreint par cette main de fer - je suis témoin, je suis le seul témoin de moi-même. Dans cette fureur, dans l'insatisfaction de l'esprit, c'est moi toujours là attendant les rues vides, avec un goût de sang et de douceur métallique. Ce besoin d'être seul dans cette chambre dont le sol est recouvert d'une mince couche de neige.

     Je tourne en rond, au bout de cette laisse d'angoisses. Il n'y a pas de tactique après avoir résidé dans l'homme et dans sa trace, dépourvu de la moindre sensation, si ce n'était cette impression de vide. La douleur abrutit - le brouillard m'obstrue la gorge. J'en ai assez de répondre ce qu'il faut répondre. Se trouver seul à vivre dans les plaisirs et les délices au milieu des gens qui tout autour gémissent et se plaignent. Et au milieu de tout ça, la mort, une mélancolique et terrible allumeuse qui ne songe qu'à elle. Une vitrine de luxe sur un pauvre.

     Le lecteur pourra se demander comment je trouve le temps de rédiger ces analyses cancérigènes. Pourquoi direz-vous? Tout simplement parce que je suis un perdant, n'ayant plus raison de sortir, le regard perdu là où le ciel est le plus noir. Ça ne me plaît pas. Je me rends compte que j'ai laissé tomber le présent pour le passé. Un chaos déconcertant d'impression, de souvenirs et d'émotions fugitives.

     Personne ne veut prendre de risque - quelques regards furtifs, pendant notre longue course - on se contentera peut-être de crever. Les hommes ne sont plus maîtres des heures. La première chose qu'on remarque ici est le silence mort qu'étouffent les poisons à qui tout le monde vient se confier - ils sont libres d'agir comme ils l'entendent. C'est que la Terre de créatures rampantes et venimeuses est aussi invisible que la nuit tombante.                            

    Vous devez vous poser des tas de questions; mais l'ignorance c'est la force... Tout le monde est déçu d'avoir cru. L'indifférence absolue; un bruit atroce, une respiration rauque. Je préfère encore le franc cynisme.

Wednesday, September 7, 2011

« Je ne suis pas le genre de mec qui se couperait l'oreille […].
 Je me tirerais une balle dans la tête si les choses tournaient mal.
 Je sauterais d'une fenêtre ».
- Bob Dylan

Les Balles Masquées – Troisième Balle
Le Trou de Balle



Pas de balle, essoufflé et trempé… Ça devait faire au moins 10 ans que je n’avais pas couru comme ça! Me sauver des ‘cops’ en plus. Wow! J’me dis que j'mérite un verre! La dernière fois que j’ai piqué un sprint aussi long et chiant, je venais de voler le drapeau du Québec sur un édifice local. Tranquille dans mon petit protocole de vol jusqu’à ce que mes ‘amis’ se rendent au Tim juste en face. Le joint de pot dans le coin de la gueule, j’ai eu comme seul reflex de partir à rire un peu fort. Comment ne pas attirer l’attention quand la tentation est trop forte!

Un verre de plus. Tout seul / ensemble – pis j’me regarde me dévisager en mille miettes sur le plancher pendant que le ciel pisse sa vie à l’extérieur. Et je ris. Je ris de moi. Et je ris de Max. Le veau n’a pas suivi. Je n’avais pas le goût qui le fasse non plus dans le fond. Je n’invite personne à ma piaule. Pas de ce temps-là en tout cas. Non ! Max n’est pas là!  Il ne m’a pas suivi mais il a vu. Il a eût la chienne de sa vie. Vous auriez dû lui voir la face. Parce que je reste toujours fidèle à moi-même, quand j’ai vu qu’il appelait la police, j’ai ris le plus fort que j’ai pu. Trop l’fun de voir sa gueule! Il était mort de trouille! Max est mort? Vive le mort! Cheers!

Mais je le comprends. Comme moi, je ne suivrais pas Bob. Pas deux secondes! Sérieusement, sauter d’une fenêtre… 'Come on' Bob !? Quand tu crois que la malchance te colle aux fesses... Quand tu te sens pris d’un malheur obsessif, tu ne sautes pas d’une fenêtre. Trop risqué – mon opinion. Tu pisses à l’ombre, tu joues au rat, au chien, au lapin ; au hamster. Tu caches ce qu’il te reste au plus profond de ta petite personne effacée et tu fermes ta putain de gueule ou tu hurles à t’en défaire les cordes vocales en sautant dans le trou pour sonder le grand vide, mais au pire, tu te contentes du rien en te disant que c’est définitivement ce qui existe de mieux dans ce que tu ne mérites pas. Pour le fait de mériter quoi que ce soit, on y reviendra. Mais, va pour la balle mon Bob!

Les trous… L’univers au complet est un trou. L’humain vient d’un trou qui sort d’un autre trou. Pis toute notre existence, on la passe à vouloir y retourner...

Max n’a pas sauté dans ce trou-là, mais il en a vu les contours. La silhouette de quelque chose plus grand que lui. De crissement plus grand que moi. Tu ‘call’ pas la police pour rien! Je  l’ai vu dans ses yeux. Ses yeux de mauviette!  

Comme je m’en doutais un peu, sa raison qui parcourait le territoire inconnu de mes propos ne s’amusait pas. Je comprends. Pas nécessairement tout le monde qui veut suivre. Il n’a pas répondu. Pas plus qu’il ne m’a donné ma foutue balle ou ne serait-ce qu’un centime de son estime. Pourquoi se faire chier avec l’existence des autres quand la nôtre est déjà sérieusement bien remplie, drapée d’un blanc apaisant et sans la moindre tache? Pourquoi se faire chier quand on peut demander à quelqu’un d’autre d’enlever de notre champ de vision quelque chose qu’on n’aime pas, qu’on ne comprend pas? Pourquoi se faire chier quand on peut appeler la police?

Une balle. Toute simple. Et Max, tu vois, la première chose que tu semblais vouloir me faire croire, c’est que ce n’était pas la chose à faire… Mon petit Maxou, dis… Puisque tu semblais si bien me connaître, est-ce que toi et moi on aurait partagé des nuits dont, par mégarde ou dans une de mes absences temporaires de plus, je n’ai aucun souvenir. Nah ! Laisse-moi deviner ! Tu m’as vu entrer avec ma gueule cadavérique de barbu-perdu-m’veux-tu ? et là, t’as seulement voulu m’aider. Tu te disais que ‘toi’, tu connais ça les gens comme ‘moi’. T’en as vu d’autres - un char pis une barge!
 
J’ai voulu un point. Un impact au vide qui s’amuse à courir le long de ma colonne vertébrale. Moi, je n’ai pas voulu atteindre le fond. Parce que le fond, je n’ai pas le goût d’y mettre quoi que ce soit, n’y serait-ce qu’un poil de cul. Mais, j’ai tout de même atteint le bout.

Ouais. L’extrémité de ma main à fait un grand cercle sur tout ce qui m’entourait en même temps que je balayais l’horizon du regard; comme Clint dans ses films. Le regard menaçant fixé sur mon passé, mon présent et mon futur travestis le temps de le dire en un némésis parfait. Du coup, il restait plus rien sur les meubles et sur les murs de ma chambre. Tout a foutu le camp par terre. Au diable le miroir! 

À quoi bon se regarder si on se fait chier, anh?



Tuesday, May 10, 2011

 « Je suis homme par mes mains et mes pieds,
mon ventre, mon cœur de viande, mon estomac
dont les nœuds me rejoignent à la putréfaction de la vie. »
-Antonin Artaud, Le Pèse-nerfs

Les Balles Masquées - Deuxième balle
La contamination



Une balle. Juste une Max. Au cas où des soldats tomberaient du ciel pour envahir l’America. Au cas où je me réveillerais peut-être juste un peu trop. Si les médicaments, les pharmaciens, la musique ou le Jäger se sauvaient pour disparaître d’un coup sec. Paf! Et que le temps venu, les brumes dissipées, même le fait de crever ne me ferait plus rien.

Je les aime les odeurs de fin du monde. Ce soir; demain. Quand la lumière est inspirante. Quand je fixe le moment dans une bouteille. Quand la réalité s’embrouille et m’abandonne stupide et aveugle. Quand je m’écris des cartes postales à moi-même pour me donner des nouvelles parce que je sais que je vais oublier. Tout oublier. Oublier les noms, les faces, les faits à grands coups de rien. Ça sent la fin, là, sur la plage ou le toit. Les nuages sont bas, c’est certain, parce que je ne me rendrai jamais si haut; je vais planter avant. Je ne sais même pas où mettre le pied.

Je devrais décrisser. Me raser, fermer ma gueule et partir comme dans les films. Et si jamais j’avais à parler, je pourrais le faire avec des sous-titres. De toute façon, je marmonne déjà bien en masse. Choisissez votre langage, ma face parle d’elle-même!

Pour l’instant, je me pousse dans le nulle-part omniprésent qui souffle sur ce qui me sert de conscience. Je me laisse guider tout droit vers un Je-ne-sais-trop-quoi en me donnant la mort à petits coups. J’ai l’anxiété, l’angoisse et la faiblesse au vif. Je me sens paranoïaque, contaminé par la pensée et le regard de tous les autres bâtards. Un ravage rouge, une vengeance démesurée et sournoise de ma solitude qui entre furieusement à l’intérieur de chacun de mes doutes. Et, pour moi, les doutes, c'est comme les vers d'oreilles Maxou. Ça martèle le cerveau sans cesse, jusqu'à ce qu'on n'en vienne à vouloir s'amputer la tête, ou s’arracher le cœur. Ça y’est, je comprends Van Gogh maintenant!

Il faut être réaliste. Je suis certain que tu l’es. Et si j’étais le moindrement brillant, moi aussi j’aurais opté pour l’autre côté du comptoir. Observer les gens, la société, le monde dans sa globalité. Les marques établies par l’ordre des choses depuis le début de notre temps et déduire quel passage est fait pour nous ou pas. Dans quel trou on saute. Mais même si j’étais certain de tout au départ, plus j’avance, plus je marche d’un pas anxieux et confus.

L’écho de mes premiers pas était sensée me guider et m’aider à avancer ? Elle s’est changer en bruit de fond incongru aux paroles fatalistes. Wow! J’ai quasiment l’air intelligent. Mais c’est avec un maximum de franchise que je t’affirme que je ne me serais jamais cru capable de tenir un discours aussi nihiliste. Ou peut-être pas tant de le tenir que d’y croire.

Ouais, je sais, ça devient lourd. Mais quand je parle de crever, ce n’est que de façon temporaire. Pourquoi ? Je ne le sais pas Max. J’aime le truc intense qui sait comme rien d’autre s’emparer de tous mes sens et me tordre. C’est comme si j’étais un morceau de linge ou probablement un torchon aux yeux de quelques-uns (je dirais bien aux yeux de plusieurs, mais il faut rester honnête. On a tout juste 4 ou 5 électrons qui tournent autour de nous) et qu’une fois bien tordu de toute ma vie, je savais finalement ce que je vaux, ce que je suis et ce que je veux. Ou enfin ce que je crois vouloir. Jusqu’à ce que je me resalisse.

Ce matin, trop saoul, je me suis levé de mon lit et je me suis rendu aux toilettes. Les mains me tremblaient tellement que je n’ai pas osé me toucher la queue pour pisser. Un truc pour que je me branle sans le vouloir. J’ai fixé la baignoire. Comme chaque matin, elle me dévisageait. Un enquêteur trop zélé qui fait de n’importe quel con son suspect numéro un. Un con comme toi Max. Comme toi pis moi. Par contre, la baignoire, elle, me connait depuis longtemps. Moi et elle, c’est une relation peu commune; c’est du durable - pas une arnaque. Un ménage à trois avec mes infidélités existentielles à répétition. Chez moi, c’est un automatisme qui nécessite aucun entretient. Ouais, ce bain-là est une espèce de pont transitoire pour l’éternité que j’aurai mérité. Tu comprends où je veux en venir? Tu peux me le dire si je t’emmerde, ça pourrait me rendre heureux.

Je me suis levé de mon lit et me suis rendu aux toilettes en marchant sur sept années de malheur qui traînaient, éparpillées au sol depuis la veille. On aurait dit que mon reflet s’était foutu de ma gueule en allant éclater un peu partout pour danser sur la tuile industrielle. C’était quand même beau! Presqu’une œuvre d’art; une installation. Tsé comme dans les expositions ? Une chance que Duchamp est mort, il serait jaloux! Jaloux de quoi, je ne le sais pas ! Mais les artistes, ça trouve toujours le moyen de se faire chier avec rien! Moi, on va dire que je suis juste un artisan du quotidien. Je cultive l’art de vivre. Ouais, on va dire…

Hier justement, je me suis dit que mon manège devenait plutôt difficile sur ma petite cervelle. Que de me voir écrasé par la dureté de l’ombre d’une insalubrité mentale ne me convenait pas. Que je devrais cultiver autre chose. Que tout ça prenait de plus en plus de place tout en étant, jour après jour, de moins en moins perspicace.

Alors dans le doute je me suis dit « on reste simple ». Simple d’esprit au pire. Parce que dans le doute, on soupçonne la vérité. Mais, comme l’a dit un certain monsieur Twain, Mark pour ne pas dire son prénom, « la vérité est la chose la plus précieuse que nous possédions. Soyons-en économe ».

On peut donc être mentalement économe et se conter une belle histoire. Commencer demain en demandant à George combien de lapins on aura sur notre ferme, et les clôtures et les hectares et les montagnes de merde qui s’accumuleront et le plaisir fou qu’on aura à s’ancrer les deux pieds dedans, le sourire aux lèvres, la joie innocente de l’existence ramenée à son plus petit dénominateur. Tout ça, dans le pire des cas.

Tu suis toujours le lapin de l’autre côté du miroir Max?

Monday, April 4, 2011

À Clint Eastwood
et son flingue.
Que chaque six-coups
repose en paix.

Les Balles Masquées - Première balle
Les complications de la chair


Une balle. Une putain de balle. Et voilà que je fous la merde. Dans ma tête, malgré le bordel, c’était si simple et sans envergure. Pas de Jésus, pas d’apocalypse, pas de question ; tout était facile. Le ciel était gris, prêt à fendre sa vessie sur une ville aux teintes monochromes. J’avais le visage long et pâle, les paupières lourdes mais transparentes à la lumière qui était, comme toujours, un peu trop présente à mon goût. Les dernières neiges fonderaient dans les semaines à venir et tout le monde ne verrait plus que l’été et son grand sourire panoramique débarquer. Moi, j’entrais à la pharmacie.

Depuis deux mois j’avais le cerveau comme un casse-tête. Chaque morceau essayait d’obtenir l’indépendance en enculant l’autre pour prendre sa position. Pas nécessairement confortable de faire entrer un truc là où il n’est pas supposé. Mal de tête, drôle de tête et tête de con comme amis, je n’aurais su rêver d’une meilleurs compagnie si je n’avais pas été avec moi. Je me suis dirigé au comptoir des prescriptions, j’ai regardé le pharmacien de mon aire absent, puis je l’ai fixé un bon moment; il a d’abord paniqué (ouais, ça paraissait dans son regard de mauviette) et s’est finalement décidé à ramener son gros cul devant moi, me donnant, par la même occasion, la chance d’admirer de plus près ses yeux de vache juxtaposés à une trop grande bouche pâteuse et ruminante de ce qui semblait vouloir être des mots de bienvenue.

Et elles ont des étiquettes; gentilles c’est petites bêtes-là. Celle-là se nomme Maxime. Maxime a le front dégarni, des lunettes épaisses qui viennent s’appuyer sur ses oreilles décollées et un air chaste de tronche d’école; mon vendeur est un premier de classe. Ou un violeur d’enfants. Enfin, il me rappel drôlement un Merlin-je-ne-sais-plus-qui ; un enfant-vieux qui venait avec moi à l’école primaire. Merlin merde ! T’es pas magicien toujours ?

Mon enfant à moi s’appellerait Zeus, question de pas le faire chier; pas Merlin. Mais question qu’il soit encore moins con que Zeus, je vais tout simplement m’abstenir de faire des enfants.

Mais lui, c’est Maxime ou probablement que si nous étions amis moi et l’être bovin, dans un quelconque égarement zoophilique, je l’appellerais Max ou Maxou, tout dépendant jusqu’où chacun de nous irait enfoncer sa langue. Manque de chance mec, ce n’est pas à moi à t’offrir quoi que ce soit. Tu me dois politesse et respect, alors cesse de me dévisager et sors un quelconque son de ta gorge ou de tes quatre estomacs! Je sais qu’en ces temps difficiles je fais peur, alors donne-moi un semblant de réaction autre que des marmonnements irréguliers ou inaudibles.

Ma prescription ? Bien sûr que je l’ai. Une balle. Cette fameuse balle. Le cul bien doré ; doré comme la chevelure d’un ange s’il te plaît. Le veau me fixe, un peu perturbé par ma réponse. Mais qu’est-ce que tu crois ? Je sais ce que tu caches derrière ton comptoir tout blanc de frais chier, pseudo contrôleur du diapason de l’âme humaine, tout propre et trop brillant. Tu as la cargaison parfaite pour que chaque être humain pardonne aux couilles de dieu d’avoir visité l’animal une fois de trop. Mais dans mon cas, l’apologie est simple. Une toute petite dorure de merde.

Tu sais, dernièrement, j’ai recommencé à boire. Dernièrement faisant ici référence à la dernière décennie en entier. À fumer le calumet de la paix. À abuser de la vodka, quelques speeds, quelques champignons magiques, du vin (du rouge, pas du blanc; le blanc me donne des maux de tête). Des valium et une quantité un peu abusive de Jägermeister. La mescaline résonne encore sous mes tempes vieillissantes, alors j’ai évité, mais j’ai toujours la langue qui frémie à l’annonce d’un quelconque médicament que je n’aurais toujours pas testé. Alors la balle, tu vois, je n’en ai jamais fait et à ce qui paraîtrait, c’est mortel.

J’ai déjà essayé l’éther, l’acide en buvard, l’ecstasy, la cocaïne, la métamphétamine, la codéine, la proscaline, la strychnine, la pharmacie de ma mère alors qu’elle se faisait bouffer par le cancer, la morphine, la cortisone, le lithium, du supeudol, Annie, Jimmy, Vicky, Danny, ta mère, ton père, ta petite cousine pas trop moche et… pour ton frère mec, désolé, il me déteste et/ou il se réserve. Et en ce qui concerne ta sœur, on y reviendra. La vaseline, mais ça c’était pour autre chose, la colle, la salvia, et tout ce qui se fait que j’ai pu fumer, humecter, boire, lécher, gratter, baiser ou sniffer. Mais j’me suis rien injecté. Jamais. J’ai gardé ma peau intacte pour le trip ultime. La parole de dieu évangélisée par la bouche d’un canon qui se glisse comme ma bite dans votre orifice préféré m’dame / m’sieur. La seule chose, outre quelques coups de lame, qui aura le droit de transpercer ma peau. La défonce ultime et logique, dans l’idée où défonce résonne ici dans le fait de générer un trou ou une fissure au travers d’un obstacle. Moi + balle = défonce. Logique, non ?

Dis, tu m’écoutes quand je me parle Max ?

Saturday, May 10, 2008

13 Mai

La Carcasse


C’est le chaos. J’ai l’œil gauche rouge vif qui s’accouple avec une foutue enflure et un bourgeon purulent; impossible de le garder ouvert. J’essaie de rester concentré de manière à enfin terminer un semblant de nouvelle qui se tienne. Pas évident. Pas d’idée. Pas assez de temps. Rien à faire, tout me dérange. Ça m’emmerde franchement ; j’ai les nerfs. Trop de bruit ou pas assez, je sais plus. La ville sent le touriste à plein nez, le téléphone du voisin sonne toutes les dix minutes, mon immeuble en carton pue et il y a des mouches partout. Si j’avais un job, je m’en accommoderais bien du temps que j’ai pour écrire, de toutes ces petites conneries, mais là, pas de travail, je me sens lâche d’y consacrer ne serait-ce qu’une seconde. Pourtant, je me creuse cent fois plus le crâne que sur n’importe quel job que j’ai pu faire auparavant. Une bougie, un orage, une bouteille de vin. Une nuit où le vent froid irait chercher dans les arbres quelques songes nocturnes… Mais aujourd’hui, il fait chaud. Le soleil est blanc et il fait chaud. Chaud et humide comme dans la chatte de la Vierge Marie. Je me fais chiant et con quand il fait chaud. Je me fais poète à deux balles quand il fait chaud. Je me dis que je dois écrire quelques pages, mais il fait chaud. Trop chaud pour que mon petit cerveau sot et prétentieux soit le moindrement intéressant ou productif. Je boirais bien une bière, mais je suis lâche quand il fait chaud ; lâche et con. En plus, j’ai pas d’argent et je préfère le vin ; le rouge.

Les années passent, la fournaise se ramène, mais mes habitudes, elles, restent. Je commence plein de trucs sans jamais les terminer. Tiens, par exemple, l’année dernière, j’étais censé mettre mon argent de côté pour partir au Mexique dès que l’automne se pointerait. Et bien non, je suis resté dans ce périmètre fantomatique tout l’hiver en croyant bien que je finirais par foutre un semblant de quelque chose. Bien sûr, j’ai fait quelques trucs ici et là, mais rien pour changer. On baise, on dort, on écrit, on fait de la musique, on se défonce et on se saoule, on mange et on chie et une année disparaît. Quelques grands noms de la chanson, du cinéma et de la politique décèdent pour vous aider à retenir quelques faits marquants, sinon la routine s’installe comme une veuve en manque et continue pour vous rassurer et ne pas trop vous déstabiliser : la guerre, la faim dans le monde, l’argent et l’alcool, la drogue, le réchauffement de la planète.

Ce putain de réchauffement. Le voilà mon problème. Il fait trop chaud et plus ça va et plus ça se détériore…Je vais bientôt être con 365 jours par année à cause de ce réchauffement.

Hier, par exemple, je trimbale ma carcasse rue d’à-côté, dans un petit bar miteux, me disant que j’allais possiblement y trouver une certaine activité capable de stimuler mon cerveau ronflard.

En entrant, à ma gauche, j’y découvre une madone sexagénaire qui fait près de 250 livres en pleine conversation eucharistique avec un homme dont la chevelure est tellement lisse qu’elle reflète parfaitement la publicité enluminée qui est au mur. Deux raclures à mettre au compte de l’assistance sociale. Je me mêle de mes affaires. Leur discussion ne me regarde pas. Je regarde ce qu’il faut regarder.

Bon sang ! C’est qu’elle a les seins tombant la madone. Je devrais peut-être même dire qu’elle a les seins tombés. En passant derrière les deux coudes de la place, j’ai pu constater que la chaleur intense des derniers mois laisse des traces partout et pas que sur moi. La grosse a un gilet dont le blanc est enterré sous un jaune crasseux tandis que le mec ciré empeste le jus de pieds et a les lunettes embuées par son propre facteur humidex. Y’a des mouches. C’est dégueulasse. Je me rends jusqu’au comptoir, croyant avoir tout vu, je regarde la télé. On y joue un film porno. Et c’est du HARD. Le genre de truc anti-chochottes. La dame aux bottes de cuir s’en prend dans tous les orifices. C’est mal filmé. Filmé avec le cul comme j’aime bien le dire. Les éclairages qui vous permettent de voir les boutons de fesses prêts à éclater. La femme en question vient de se raser et son rebrousse-poil est échauffé et rouge sang. C’est vraiment dégueulasse.

Sans trop m’en rendre compte, je laisse aller un « il est où le rose d’antan, m’dame ? » assez fort pour faire tourner la tête de mes deux gus du bout du bar ; je reçois en prime le sourire perdu de Miss seins bas. Est-ce que quelqu’un pourrait enfin montrer à ce petit américain ou à ce français merdeux comment tourner un film de cul qui se respecte ? C’est insoutenable.

Un pote à moi m’avait déjà refilé quelques bobines asiatiques. Du genre plus arty. ‘L’attaque des Lesbiennes Ninjas’ si je ne me trompe pas. Pas de ninjas, pas d’attaque, mais des lesbiennes en bonne et due forme. Les éclairages soignés au possible, les cadrages qui donnent le goût d’y mettre la main, le son ambiophonique – prologique – toute la merde de George Lucas quoi, les sabres laser en moins (j’y comprends rien à tout ces termes techniques et je parle de film de cul, donc la technique, on sait où elle va.) Il y avait donc ces deux femmes de l’Est qui se donnaient un plaisir certain à jouer cette tragédie pornographique ‘Asie, vas-y !’ en me montrant la grandeur de leur talent qui s’étalait du SOFT au HARD et du HARD au SOFT.

Bon, d’accord, la grandeur d’un talent c’est relatif, mais le temps aussi. Je veux dire, si on prend pour exemple les lignes chaudes, j’ai lu quelque part que la durée moyenne d’un appel est d’environ trois minutes. Et pour avoir travailler plusieurs années dans un vidéo club, les films pornos, avec leurs introductions à la con, ne se font pas regarder plus de dix minutes. Autrement dit, le publique cible de ce genre d’ouvrage est satisfait en quelques instants. Du coup, je me dis qu’on devrait donner aux petits branleurs précoces des films un peu moins longs, soit entre quinze à vingt minutes, et faire dans la qualité pour qu’ils sachent au moins baiser de la bonne manière ou enfin, qu’ils aient de vraies raison de s’exciter. Non, mais maintenant vous voyez où je veux en venir. J’étais entré là pour y trouver une certaine activité cérébrale et je me suis retrouvé à faire de la masturbation mentale sans jamais avoir une saloperie d’érection.

Avec tout l’ennui causé par le film, j’avais la fatigue qui me grugeait tous les muscles, dont mon joli petit cerveau qui était encore encombré de quelques bières et d’un surplus de rien-à-chier ; parce que dans ma tête, il devait être quelque chose comme 3 heures du matin tellement la chaleur me tendait l’envie de dormir, de vomir et de chialer.

Je suis sorti du bar pour revenir chez moi, mais j’étais tout simplement un peu trop claqué. Assis sur un bloc de marbre du genre à vous équilibrer les hémorroïdes, j’ai demandé à un quatuor madame monsieur s’il savait quelle heure il était. J’ai obtenu une réponse stéréophonique désynchronisée. Seulement minuit. La nuit était encore un peu trop jeune pour être fatigué.

Je devais me réveiller avant de retourner m’enfermer à mon appartement. Après tout, je n’avais rien trouver de ce pourquoi j’étais sorti plus tôt, excepté les bières.

Je me rends dans une crêperie, Allée des Touristes. Qu’on soit Mardi ou Dimanche, l’endroit fourmille toujours de ces gens plein d’argent qui viennent de partout dans le monde. Aujourd’hui, on est je-sais-pas-quand, mais les fourmis sont plus riches que la dernière fois. Avec mon allure de rien et mon sac à dos de mec qui s’en va, la dame de la porte voit dès mon arrivé que je suis l’homme d’un café et du refill, tout au plus. Ses clients ne m’aimeront pas. C’est que s’ils visent la moyenne des gens du coin en me jugeant, on est dans de beaux draps; je ne vaux rien.

Je vois bien que les touristes font dans la charité juste en me regardant. Les messieurs ont pour la plupart dans la cinquantaine, sont chauves, ont le sourire garnie de belles dents blanches et droites. Ajoutez aussi une de leur fesse qui se remonte sur une pile de billets qui devrait les faire rougir. Les dames sont en générale vers la fin de la vingtaine, avec le monsieur en question pour des raisons de remonte-fesse, elles ont tout de la reine d’un bal de fin d’études; l’habillement, l’allure, la chevelure, les lèvres, les seins et le vide. Quelques enfants aux yeux fatigués par l’heure et la chaleur tiennent le coup dans l’espoir que la soirée se termine au plus tôt ; que leur fausse famille disparaisse au moins le temps d’une nuit. Ça y’est. Je me fais encore chier. Je la vois venir de loin ma petite poésie des bas fonds. J’ai vraiment rien à faire dans cet endroit. Le petit serveur peut se foutre mon réchaud au visage s’il le veut, je m’en vais. Pendant que le gérant de la place ne comprend rien aux demandes de son nouvel arrivant qui cause en ISCH, j’en profite pour m’en aller sans payer. Aimable la dame de la porte, elle me fait un petit clin d’œil. Elle a pu voir la scène au complet et elle rie. J’étais pas le seul à me faire chier dans cette place.

C’est peut-être ennuyant, mais c’est quand même pratique l’Allée des Touristes. Avant de retourner à mon appartement, je m’arrête à un petit dépanneur ouvert toute la nuit et j’en profite pour continuer mon approvisionnement gratuit alors que le vietnamien de service est derrière le comptoir, trop occupé par une petite blonde pas moche du tout qui semble hésiter entre différentes sortes de suçons. Allez, vas-y mec ! En autant que tu me laisses me prendre à déjeuner, moi je ne dirai rien à personne. Je le regarde et je lui fais un clin d’œil ; et je suis presque aussi mignon que la petite dame. Il me montre un sourire de conquérant ; c’est un champion. Jamais annoncés les spéciaux de nuit et je comprend pourquoi. C’est l’heure de rentrer.

Les mouches, elles collent et elles commencent à m’inquiéter. En remontant les marches, j’ai cru remarquer une forte odeur de pourriture au premier et il y avait là un troupeau de mouches dignes des plus grands westerns… enfin, si elles avaient eu des cornes. Laissez tomber, je me comprends.

Trois quarts d’heure après être rentré, j’ai pu en compter au moins une dizaine qui s’étaient faufilées dans mon appartement. L’immeuble a sa petite odeur, mais merde, moi, je me lave. Ça me donne une curieuse impression de fin de race humaine.

Elles s’agrippent à tout ces mouches, semblent ne plus vouloir bouger ou lorsqu’elles ont à le faire, elles volent au ras du sol comme des avions de chasse. Même mon chat se pose des questions ; lui qui a pour passe-temps de les assommer et de s’amuser avec elles en les contrôlant de ses pouces. Ouais, parce que mon chat a des pouces. Vous voyez, y’a pas que la chaleur, y’a toutes ces progressions, métamorphoses et autres transmutations génétiques. Bizarre l’évolution des chromosomes. Ces espèces qui disparaissent chaque jour en échange de nouveaux trucs inconnus.

La semaine dernière, en fouillant un peu dans le journal, après les pages de politique foireuse et les avis de décès, j’ai trouvé un article avec photo qui montrait un chat avec deux visages pour une tête. L’animal est décédé deux jours après la naissance. Et voilà qu’aujourd’hui, une autre photo, un type de Floride, monsieur Horton qui s’appelle, s’exhibe le chaton aux deux visages. Merde, dans quelques temps, elles survivront ces bestioles-là. Alors, si l’évolution c’est ça …j’ai vraiment hâte au jour où je vais pouvoir observer la doublure de l’Univers se ramener le cul sur elle-même.

Je me fais probablement égoïste, mais mon plus grand rêve, c’est de me lever un matin, voir tout ces ploucs courir à droite et à gauche, les entendre implorer leurs dieux à la con alors qu’on vient d’annoncer la pas si triste fin du monde. Ouais, mon rêve, c’est de voir sauter cette petite planète de mon vivant. Je me vois très bien assis sur une chaise pliante sous un ciel orageux qui me verse les derniers psaumes de l’Apocalypse sur la tête, pendant que je souris une dernière fois avant de me faire éjecter de ce confortable et pervers petit siège d’être humain. Ouais, mon rêve c’est de me lever un matin et de voir la Finale. Et la Finale, c’est un parfait chaos.